A la fin de son service, Miros regagne sa chambre où Michalo dort toujours aussi profondément. Il a un pincement au coeur en pensant à Tim qui partage la couche d'Arnold et au prochain escort qui va le remplacer. Tout ceci lui laisse peu de place pour trouver le chemin du coeur d'Arnold. Il s'étonne lui-même de sa détermination, comme s'il voulait tirer satisfaction de ramener Arnold vers un comportement plus sain, plus naturel, comme s'il voulait aussi profiter de cette relation telle qu'il se l'imagine pouvant se développer dans la vie réelle, avec des amis, des connaissances, des relations professionnelles.
Miros se demande à quel manque en lui Arnold répond. Peut-être est-ce l'absence de père, qu'il n'a pas connu puisqu'il a été élevé par sa mère seule. Mais Arnold est beaucoup plus qu'un père. C'est un homme puissant, capable d'apaiser les tensions, les jalousies, les haines car il s'installe au-dessus de tout ça comme un maître des coeurs et des esprits.
Comment Arnold pourrait-il s'intéresser à Miros, autrement que comme à un corps ? Un corps certes beau mais un parmi tant d'autres beaux corps de gars qui font masse autour d'Arnold. Miros n'a pas une très bonne image de lui-même. C'est certainement un de ses défauts.
Michalo se retourne et se réveille brutalement. Il se redresse appuyé sur le coude et regarde Miros l'air égaré comme s'il ne savait pas où il était, avant de se laisser aller allongé de nouveau sur le dos, les mains sur le visage comme s'il voulait cacher ses tremblements et ses larmes. Miros lui parle pour tenter de l'aider:
-
Tu tiens le coup ?
-
Pas terrible.
-
Tu veux que je te donne de la crème cicatrisante pour ton cul ?
-
Oui merci. Arnold m'a massacré, un vrai salaud !
-
Certes, il n'est pas tendre.
-
Pire que ça ! Il a massacré Tim, il a fini par l'ouvrir comme une porte de prison !
Miros fait la grimace:
-
C'est aussi sérieux que ça ?
-
Ce mec est un malade, un obsédé de la bite. Il fore encore et encore, plus il fait mal et plus il est content !
Miros se demande pourquoi son premier mouvement est de chercher à excuser la brutalité d'Arnold alors qu'il ne peut pas l'être:
-
Il ne faudrait pas qu'il continue. Je devrais lui parler.
-
Cela m'étonnerait qu'il t'écoute ! Tu n'es rien qu'un corps de plus pour lui !
Miros laisse échapper un cri du coeur:
-
Il me semble qu'il m'aime bien !
-
Jusqu'à ce qu'il te transperce, comme il me l'a fait !
-
Peut-être que j'arriverais à le faire changer de comportement.
-
Tu peux toujours espérer. Il est incorrigible.
Michalo se saisit du tube de vaseline que lui tend Miros et s'installe sur le côté pour pouvoir s'enduire plus commodément:
-
Tu as fait le service ce soir ?
-
Oui
-
C'était correct ?
-
Facile
-
Ils étaient combien ?
-
Quatre et les escorts à la cuisine en train de manger.
-
Et Andréï ?
Miros est gêné de lui en parler : il voudrait ne pas affoler Michalo davantage.
-
Tu l'as vu ?
-
Oui.
-
Et alors ?
-
Il a deux escorts sur des slings.
-
J'imagine qu'il les torture grave ?
-
Oui.
Michalo soupire, l'air effrayé:
-
Où sommes-nous tombés ? Robert n'aurait pas dû nous sélectionner.
Miros hausse les épaules:
-
C'est trop tard maintenant.
Michalo pleurniche doucement:
-
C'est trop injuste !
Miros commente sobrement:
-
Il ne faut pas qu'ils se servent de nous comme ils le font avec les escorts !
-
Certainement pas ! Mais comment y arriver ? Robert dit qu'il peut nous défendre mais il ne fait pas le poids contre Arnold et Andréï.
Miros lance:
-
Seul Arnold peut nous aider.
-
Comment ça ?
-
C'est lui qui a le pouvoir ici.
Michalo gémit tout haut:
-
Il va me défoncer encore et encore ! Toi aussi tu vas y passer !
-
Je vais essayer de lui parler. Il me semble qu'il a un faible pour moi.
-
Bonne chance ! J'espère que tu vas y arriver car sinon nous sommes perdus.
